Tom Waits : Bad As Me

Un nouvel album de Tom Waits est forcément un événement. Ce dernier sort le 24 octobre et de la part d’un type qui a été capable de pondre ces dernières décennies Closing Time, Blue Valentine, Frank Wild Years, et plus récemment, en 2006, le somptueux Orphans, on s’attend toujours à tout…

“Devil wants a sinner ”

Heureusement, concernant ce dernier opus, j’ai comme l’impression que ce bon vieux Tom a signé avec l’homme en noir il y a un petit bout de temps déjà ; un bon paraphe en bas du contrat, le tout contre des larmes en vinyle et une âme pleine de bleus. La preuve, il est éternel… On démarre sur les chapeaux de roue direction Chicago : point de départ iconoclaste vers la mythique route 66 (ou 666 ?). Possible car Tom enchaîne sans vergogne avec Raised Right Men, un blues dégingandé, entre rythmiques lancinantes d’un trip hop passé à la canne à sucre et déhanchés vocaux à la Elvis. Le vieux pervers a encore de la sève !

“Put me back in the crowd ”

Puis c’est l’invitation à une promenade nonchalante sur des quais pour toujours embrumés. Mais qui, nom de dieu, chante sur Talking At The Same Time ? Certainement pas lui… Ou peut-être si… Cette voix souple, ce timbre de chanteur soul, est-ce possible ? Oui, car depuis toujours, Tom Waits exhibe un monstre qui ne l’habite qu’à moitié. Ceux qui l’ont vu en concert le savent, Waits est un vocaliste de génie qui a préféré prendre une voix de traverse. Il hésite, se perd et ose d’émouvantes ballades comme Pay me ou Last leaf, invitant à sa table une Irlande imaginaire ou de vieux crooners de motel (Back in the crowd, Kiss me).

“When I’m grieving: satisfaction… ”

Chassez le naturel, il revient au galop ! Personne n’est aussi mal intentionné que Tom Waits. Avec Get Lost, son rockabilly de perdition lance en guise de boutade un « please, please, love me tender » complètement tordu. Marrant d’ailleurs comme il enfile si tardivement les blue suede shoes du King… Puis, il n’hésite pas à s’adresser directement à son alter ego maléfique sur Bad As me, le titre éponyme. Là, comme sur Hell Broke Luce ou Satisfied, on retrouve celui qui inspira les enragés de Hell’s Kitchen et qui crache encore un blues en guise d’hommage possédé aux Stones : « Now Mr. Jagger and Mr. Richards, I will scratch where I’ve been itching »… Hommage, tu parles, c’est Keith qui gratte… la guitare ! Il apparaît d’ailleurs sur plusieurs titres et donne de la voix sur Last leaf. Et il n’est pas le seul, de Marc Ribot en passant par Flea, des Red Hot, ils sont tous là ! Satisfaction…

“I’m going away

Mais le voyage continue, nonchalant, le long de l’autoroute déserte des adieux. Car si « le diable veut un pécheur… la route veut un homme… je tourne mon visage vers la route et je te tourne le dos… ». Nous, tout ce que l’on espère à l’écoute d’un tel album, c’est que ce ne soit pas le dernier, et que le diable vienne réclamer son dû le plus tard possible.

Pour écouter l’album en streaming avant sa sortie : http://badasme.com/

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