Quai d’Ivry, on se fait remonter « La Bretelle »

« Pinouille !  Pas par-là, c’est le périph ! » Oui, attention mon lapin, depuis début 2023, sous l’échangeur du Quai d’Ivry, tes semblables égayent en savoureuse terrine la table d’une guinguette appelée… « La Bretelle ». Logique non ?

Je sais, vous allez me dire qu’il n’y a rien de pire que de s’imaginer en train de siroter un demi sous le périphérique, équivalent parisien des cercles de l’enfer. C’est vrai, mais l’affreux vieux périph est à la mode : regardez toutes ces boîtes qui y fleurissent en été. Berlin n’a qu’à bien se tenir ! Les loyers flambent, Paris est un univers en pleine extension et les bretelles du périphérique ne sont plus suffisantes pour l’empêcher de déborder vers la petite couronne.

Tout de même, au sud de ce quartier en pleine rénovation, l’endroit dénote dans le bon sens du terme. Il faut dire que dans ce coin du 13ème, on s’est lâché côté architecture. Jeux de cubes en béton collés les uns aux autres, allées rectilignes pratiquement dépourvues de végétation et Tours Duo à la American Psycho, on n’est pas tout à fait en phase avec les recommandations du CAE.

Ce qui n’empêche pas nos Patrick Bateman locaux d’avoir faim et soif, bien au contraire. C’est qu’il faut prendre des forces avant de jouer avec vos fonds de pension ! Blague à part, si les yuppies du 21ème siècle fréquentent le midi ce bar-restaurant aussi informel que surprenant, c’est plutôt bon signe.

Bien attablés dans le restaurant bulle, nos « costumes bleus » y côtoient les habitants du quartier – les moins revêches, ceux qui ne se plaignent pas de la musique le soir, forcément plus « bruyante » que le 30 tonnes en train de passer – et les jeunes créateurs du coin. Au-dessus d’eux, « le plat de nouilles » ; sur la table, une cuisine fusion fraîche et efficace, et tout autour, une friche avec un petit air de jardin à la dérive, lampions compris. Un vrai tiers-lieu on vous dit.

Pour notre part, à bientôt 22h passées, on nous a gentiment servi la fameuse terrine à base de léporidés, apparemment aussi rustique que fameuse (je n’aime pas le Panpan), un houmous de lentilles parfumé et crémeux à souhait et des bâtonnets de polenta bien dorés. Une finger food parfaite, arrosée de vin espagnol naturel léger et fruité qui, d’avis général, aurait presque pu lorgner vers le beaujolais. Attention, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, il y a d’excellents beaujolais.

Espérons que ce « boui-boui quali » comme ils se définissent eux-mêmes, maintiendra le niveau. Si c’est le cas, promis, on reviendra se perdre sous cette étrange voûte de béton ciré à l’occasion d’un concert – oui, ils en organisent parfois – d’un concours de pétanque ou d’une Guinguette Plage Party. Sérieux, on va se les péter, ces bretelles !

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Photo de la playlist :  © Guillaume Lancestre