St Lô : electric show

Premier jour de ce printemps 2014 qui court et se dépêche de fleurir, Paris, le Nouveau Casino. Il n’aura pas fallu cinq minutes, après la prestation siphonnée d’Elyas Khan, prestidigitateur iconoclaste du groove, pour que la température monte encore d’un cran. Le concert de St Lô a commencé…

Elyas Khan“We’re here to bring you this motherfuckin’ beat !”

Lumières noires et pourprées, de chaque côté de la scène, on a sorti l’artillerie lourde. Ton’s et iOta se placent derrière leurs synthés, l’un muni d’une batterie. Puis Miz Walidah – chemise blanche, gilet et nœud pap’ – fait son entrée. Ce sera Reach, et c’est déjà l’hystérie. Le ton est donné : lourd, puissant, menaçant et hypnotique.

Reach, avec Legendary, est le premier titre qui a vraiment retenu mon attention lors de la sortie de l’album, Room 415, le 10 mars dernier. Puis les autres titres, dont My Bottle et le fantastique In The Pines (pas vraiment la même version que celle de Tennessee Ernie Ford ou de Nirvana, hein ?) ont peu à peu fait leur chemin. Sans m’en rendre compte, au bout de quelques heures, j’étais déjà tellement accro que l’état de manque ne s’est vu soulagé qu’à l’annonce de leur venue à Paris.

St. Lô - Miz WalidahCar St Lô, sur scène, c’est une grande piqûre d’adrénaline en plein cœur ; les effets secondaires ne tardent d’ailleurs pas à se faire sentir, des frissons vous parcourent l’échine, un serpent vous remonte le long de la colonne vertébrale et lorsqu’enfin, il s’attaque à la naissance du cuir chevelu, vous voilà contraint de vous agiter comme un possédé et de hurler… et ce shoot tu en redemandes ! D’ailleurs, si tu n’as pas bougé, il y a fort à parier que tu sois sourd, hémiplégique ou mort…

Et le blues dans tout ça ?

« Vous aimez le hip-hop ? Vous aimez la house ? Vous aimez le R&B ? Vous aimez le rock’ n’ roll ? (Ici des beuglements gutturaux se font entendre, le Parisien a ses préférences) Alors vous aimez… le blues ! ». Personne ne contredira Miz Walidah sur ce point-là !

Car c’est de bien cela qu’il s’agit, d’un blues électrifié et tonitruant passé à la moulinette d’un trip-hop délirant et sauvage, le tout atteignant un niveau de fusion vous faisant bientôt passer à l’état liquide. Inutile de définir le style St Lô, que ce soit sur disque ou sur scène, à peine oserait-on la comparaison avec un mariage monstrueux entre Nina Simone – la niaque en plus – et les Chemical Brothers, et encore.

St. Lô - Miz WalidahMiz Walidah, Hanifah de son prénom, est une diva sans en avoir les grâces poseuses ; sa voix polymorphe est une vraie décharge électrique. Tout à tour chanteuse soul, pantin désarticulé, démon androgyne (vous êtes prévenus, si l’on entend encore le mot « genre », on sort le gun !) et marathonienne du beat. La fin de cette prestation tout en muscles et en fureur, avec le rap qui s’invite en guest, vous laisse sur le carreau, enfin. Des mois (des années ?) qu’on n’avait pas vu ça chez HdO, et on en voit…

Une fois dehors, la nuit est douce, sur les arbres, les feuilles ont poussé. Les terrasses sont bondées et l’on s’en va, heureux, les poings dans nos poches crevées, tirant comme des lyres, les élastiques de nos souliers blessés… Legendary.

Pour les malheureux qui ont loupé ça, St Lô continue sa tournée : http://wearestlo.tumblr.com