Ane Brun : état de grâce

Focus sur l’une des artistes qui a marqué l’année 2011 avec un album somptueux – It All Starts With One – et un concert mémorable au Trianon le 15 octobre dernier. L’occasion de la (re)découvrir sous son meilleur jour et de l’inscrire sur sa liste au Père Noël.

Ce qu’il y a de marrant, et de fascinant, avec Ane Brun, c’est la parfaite concordance entre son évolution scénique et son parcours discographique. Au départ, tout aurait pu faire craindre une énième chanteuse folk venue du froid si, peu à peu, sa tessiture étrange, à mi-chemin entre Kate Bush et Dolly Parton, l’élégance de ses compositions et un professionnalisme peu courant ne l’avaient fait grimper au sommet.

Un pic neigeux où cette reine des glaces, norvégienne d’origine installée à Stockholm depuis plusieurs années, se permet de faire fondre les plus réticents, Peter Gabriel compris, qui lui a demandé de l’accompagner en tournée et avec qui elle a enregistré une reprise de Don’t Give Up sur New Blood, son dernier album. Oui, on a le droit de verser une larme…

Au Trianon, ce soir-là, Ane Brun semble habitée, impose sa rythmique propre, une exultation liée à la danse, à la course. Après une intro lancinante enchaînant These Days, One et Worship (mention spéciale à la version de l’album, ne serait-ce que pour le refrain hypnotique de José Gonzales). Très vite, la comparaison s’impose : Ane Brun a quelque chose à voir avec le ciel… Voix céleste bien sûr mais beauté changeante aussi, la transformant tour à tour en femme-fleur, déesse nordique ou derviche sensuelle.

Rouge. Vert. Jaune. D’habiles liaisons lumineuses recomposent le Puzzle et l’animation retombe ; la mélancolie s’étire en fumeroles troubles. On savait Ane Brun chanteuse, on la découvre vocaliste, capable de changer de timbre et de registre avec une apparente facilité, psalmodiant comme une orientale, réinterprétant entièrement certains morceaux, sortant de l’ombre les titres de l’album bonus.

Le Trianon, d’abord timide et recueilli, s’extasie sans complexe, pendant que l’orchestre – Ane sait s’entourer : de sirènes multi-instrumentistes comme Linnéa Olsson, de percussionnistes confirmés – monte en puissance. On ose le chœur a capella, mais oui, malgré une timidité bien française, et nous voilà en train de demander de croire (« believe ! ») à l’entêtée qui répond « I won’t believe » puis finit par céder avec bonne grâce : « I’m beginning to believe… Oh, I do believe ! »

Comme on le pressentait à l’écoute de l’album, ses nouveaux titres sont des bêtes de scène. Et la joyeuse pythie de faire mine d’arrêter là avec l’imparable Do You Remember et sa rythmique presque africaine (First Aid Kit, duo féminin et suédois, donne de la voix pour les chœurs dans la version studio). Le public se lève et danse, malgré les fauteuils.

Les rappels voient à nouveau s’illuminer les riches heures de la pop triste des années 80 avec la reprise de Big in Japan d’Alphaville et la surprise : une berceuse, en norvégien. « La Norvège ressemble à une guitare… Moi, j’habite là… », confie t-elle. Puis viennent Balloon Ranger, The Light from one, Undertow

Ane Brun nous aura interprété la quasi totalité de son dernier album, laissé imaginer quelques pépites à venir et plongé dans une douce folie. Le folk en état de grâce…

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