Transmusicales 2019 : transe intense

Des festivals, on en a couvert un paquet sur HdO mais ces Transmusicales 2019 était une première. Rien que sur le papier, l’aventure promettait d’être extrême : plus de 80 groupes venus du monde entier, des heures de concert, en ville ou au parc expo, de la marche à pied, des interviews, parfois réalisées en pleine nuit, blanche d’ailleurs la nuit… Alors, qu’est-ce que ça a donné ? Compte-rendu !

Mercredi 4 décembre : General strike

Lessivé, laminé, harassé, le festivalier moyen repart en général des Transmusicales l’œil vitreux, le foie attaqué et l’oreille presque toujours ravie. Le journaliste, lui, en sortira comme un marathonien gavé aux endorphines, redescente et symptômes de manque compris. Car impossible n’est pas français ! Participer à, et organiser, un festival aussi énorme que les Transmusicales en pleine grève généralisée aurait du avoir raison de n’importe quels individus censés mais qu’à cela ne tienne, on y viendrait à ces foutues Rencontres : covoiturés, à cheval, à pied, en bus affrété, et même, et ça c’est rock, en TGV…

Incroyable mais vrai, me voilà donc à Rennes. La brume recouvre la ville d’un voile glacé, les manèges tournent dans l’obscurité, gentils petits chevaux de bois ou centrifugeuses prêtes à vous broyer, et c’est presque à l’aveugle que je me dirige vers l’Ubu pour la soirée d’ouverture. On ne nous avait pas menti, l’Ubu est une salle aussi mythique qu’invraisemblable. Une pièce minuscule, une scène à peine moins grande, un couloir aveugle et un énorme bar où perdre ses points retraite, c’est à la fois incohérent, convivial et biscornu.

Agglutinés devant la scène, il y a presque autant de photographes et d’invités que de festivaliers à proprement parler, voire plus. Petit Fat mixe du gros son, des trucs qui fleurent bon le rock’n roll et le garage 60’s ; le public n’est pas très jeune, ça opine du chef sous les psychétropes, rien à dire le set est adapté…. Enfin, Jean-Louis Brossard, cofondateur et programmateur du festival, donne le Go : les Transmusicales 2019 peuvent commencer !

Les Grys-Grys - Ubu Transmusicales Rennes © Nicolas Joubard
Les Grys-Grys – Ubu © Nicolas Joubard

Et tout de suite, c’est foutraque, complètement survolté, avec la prestation des inénarables Grys-Grys, groupe originaire de Montpellier, qui a le bon goût d’enfiler les titres comme des perles sans se soucier de l’ordre, des ponts, et des litres de sueur déversée. Guitares, cheveux longs, futales bien ajustés, ça déchire au chant et à grand coups de riffs énervés. De quels morceaux il s’agissait ? Franchement… Tout s’enchaîne à 200 à l’heure car ici, le but est de s’amuser, de faire la fête sans se prendre la tête. Perché dans un coin, l’harmoniciste, dégoulinant, ne tient plus qu’à un fil, celui de son instrument. Tout le monde se marre, c’est un succès.

U-Zhaan & Roy - Ubu Transmusicales Rennes © Caroline Bodin
U-Zhaan & Roy – Ubu © Caroline Bodin

Aux antipodes de ce revival décomplexé, voici ensuite le hip-hop décalé des japonais U-Zhaan & Roy, apparemment sans Dopeness. Roy, jeune rappeur un peu lunaire, arrive sur scène pour les réglages le visage recouvert d’un masque chirurgical : c’est concept, ou alors, il avait vraiment la grippe ? Heureusement, il délaisse son curieux accessoire et U-Zhaan, excentrique et talentueux joueur de tablas, l’accompagne tout en créant des loops moelleux et hypnotiques. « Chuut, he’s making loops ! » murmure Roy, qui s’essaye aussi à parler français – un de leurs morceaux parle même de « bonbons japonais » nous apprend t-il – mais pour le calme, c’est pas gagné…

Et Bantou Mentale ? C’était bien, il paraît… Les tripes retournées à l’idée du programme du lendemain, honteusement, je déclare forfait.