Rock en Seine 2013 : jour 2

Laura MvulaJ’ai eu beau être séduite par la soul envoûtante et gracieuse de Laura Mvula, emballée par la prestation enjôleuse et enlevée de la chanteuse blues folky Valerie June ; j’ai eu beau m’engager avec ferveur dans un pogo déchaîné lors du concert sous anabolisants du cultissime Nine Inch Nails (et j’ai bien failli y laisser mes orteils !) ; j’ai eu beau essayer de ne pas être déçue par la pop survoltée de La Femme, d’apprécier la Guinness à l’heure du thé, de revenir de cette journée du 24 août à Rock en Seine des souvenirs extatiques plein la tête, un seul concert m’a réellement marquée : celui de Fauve, en toute fin de soirée.

Valerie JunePendant le concert, ma voisine s’est pourtant évertuée à balancer régulièrement son sac dans mes côtes et à m’envoyer sa blonde chevelure dans la gueule ; mon dos et mes pieds étaient ruinés par une longue et belle journée (malgré le faux bond du soleil) à arpenter le festival dans tous les sens ; faute de place, je n’ai pas eu d’autre choix que de regarder le concert en tenant sur une seule jambe ; la pluie s’est mise à tomber en plein milieu du show et ma voisine a cette fois tenté de me crever un œil avec une baleine de parapluie ; autant dire que je n’étais plus vraiment en mesure de m’enthousiasmer pour quoi que ce soit.

Eugene McguinnessPourtant, j’ai été immédiatement captivée par le flow habité du chanteur où s’entrechoquent perspectives d’avenir sans sel ni âme, quotidien monotone avec ce même trajet en RER, ce même bureau, cette même salade composée hors de prix que l’on absorbe à toute vitesse pendant la pause déjeuner ; sentiment douloureux de ne pas être à sa place, d’être en périphérie du vivant, désir de s’en sortir malgré tout, mais pas à n’importe quel prix.  Ces mots qui tabassent, ce verbe fort, cette voix qui n’hésite pas à gueuler, à chanter faux, se foutant bien des jugements hâtifs et des critiques acerbes, ce chanteur qui ne cesse de bondir, de courir d’un bout à l’autre de la scène, de sauter et de bouger tel un gamin hyperactif bien décidé à en découdre m’ont bouleversée et ont visiblement ému la foule très dense et déjà conquise de Rock en Seine.

 FauveJe n’ai pas regretté une seule seconde d’avoir loupé Phoenix, tant la prestation énergique, généreuse et intense de Fauve m’a époustouflée. De Haut les cœurs à Kané en passant par Blizzard et Nuits Fauve, les textes rageurs et sensibles du groupe ont été repris à l’unisson par le public qui aura bien du mal à se passer de Fauve dans les mois à venir. Le collectif en effet donnait à Rock en Seine son dernier concert de la saison avant d’entrer en studio pour enregistrer son album. « Il y a un an, on était dans des bureaux, on était dans le métro et on avait le blizzard », s’est étonné le chanteur, qui n’en revenait toujours pas de jouer à Rock en Seine et qui s’est remémoré une année riche en concerts et en rencontres. En succès aussi, Fauve ayant suscité ces derniers temps un engouement extraordinaire.

C’est donc à mon tour totalement bluffée par ce concert épatant que j’ai quitté Rock en Seine avec mon amie et rédactrice en chef d’HdO pour rejoindre le métro, espérant encore pouvoir éviter un trajet anxiogène digne d’un lundi matin à l’heure de pointe. Ce fut malheureusement pire encore ; malgré une nuit qui s’annonçait fauve, le blizzard nous est méchamment retombé dessus. Définitivement, Paris ça s’écrit bien  « m-e-r-d-e ».