Dr. John – Locked Down
A la croisée des chemins, entre bayou et ruelles peuplées d’esprits et de musique poisseuse, attend un personnage coiffé de plumes. Sa barbe grise, sa canne, ses amulettes, font partie d’un déguisement qui ne trompe personne : Dr. John n’a pas plus de 30 ans. Il n’a plus d’âge, il crache à la face du temps.
Guidé par Ellegua, déité enfantine et joueuse, le bon docteur s’est réconcilié avec son passé et un certain Mac Rebennack, c’est à dire lui-même… Autrefois Locked Down – enfermé –, le voilà libre de faire autre chose, d’unir l’âme de la Nouvelle-Orléans, son métissage créole et insolent, à celle d’un autre spin doctor du rock, Dan Auerbach, Mr. Black Keys himself.
Les bien pensants crieront peut-être au passéisme mais ils auraient tort car aucune nostalgie n’habite l’album de ce Night Tripper impénitent. Les invocations qui s’en dégagent sont claires et le langage des saints tout aussi évident : Revolution… « Rebellious Revolution » pour être précis.
Les arrangements font mouche à chaque plage, souvent portés par des chœurs plein de soul, et les élucubrations de ce grand bonimenteur de blues font corps avec l’enthousiasme de musiciens comme Max Weissenfeldt, dont le travail aux percussions impressionne. Sur Getaway, Dan Auerbach s’affirme en guitar hero, nous faisant ainsi partager la joie qui doit être la sienne : jouer avec Dr. John, sentir son mojo couler dans ses veines et faire vibrer la guitare, encore et encore… « A love that will never end ». L’ordonnance a l’air valable.
Locked Down est un album qui donne par moment envie de courir, de se jeter à l’eau, d’avaler un bouteille de rhum pimenté avant de tomber à genoux, le cœur gonflé de reconnaissance. Mais ne vous y trompez pas, Locked Down n’est pas Gris-Gris… Pourtant, c’est sûrement l’un des meilleurs albums de Dr. John, et de Mac Rebennack. Peut-être aussi, finalement, l’un des meilleurs de Dan Auerbach…
Dr. John sera en concert à la Cigale le 4 juillet 2012, au Nice Jazz Fest et au Blues Festival de Cahors
