Sous le sapin d’Hdo : du folk pour résister, se consoler et s’évader

« Je ne veux pas de ponts, je veux des rivières, je veux des torrents où tourbillonner, je veux cette vie, je la veux entière, même si mon cœur y doit suffoquer. » (Anne Sylvestre – Tiens-toi droit)

Voici pour Noël l’un des deux biens essentiels à glisser sous le sapin, ceux qui donnent du sens à nos vies, qui nous soutiennent et nous consolent, qui nous aident à tenir, résister et combattre, qui nous font sortir de nous-mêmes et nous ouvrir aux autres, qui nous font espérer, rêver et voyager… et rester libres.

Ondara – Folk n’Roll Volume 1 : Tales of Isolation (2020) et Tales of America (2019)

Cet album est une merveilleuse et salvatrice pulsion de vie jaillie de cette année asphyxiante. Une totale mise à nue sincère, sur un folk dépouillé et ultra intimiste, des émotions et angoisses qui ont traversé ce folk singer de génie, J.S Ondara, pendant le confinement printanier. Il a été élaboré en moins d’une semaine, avons-nous lu, à Minneapolis, là où George Floyd a été tué par des policiers, là où ses mots, « I can’t breathe », son corps, son âme, son être ont été niés, déniés puis étouffés.

C’était risqué de mettre en musique et en mots ce qui reste encore à ce jour en travers de la gorge : l’isolement social et psychique, les inégalités criantes, les injustices quotidiennes, la liberté entravée, la dépression qui guette, l’ennui qui colle à la peau. Avec ce disque sublime, le musicien kenyan, installé aux Etats-Unis depuis plusieurs années, guidé par Dylan, son étoile du berger, réussit avec un talent infini à transcender par la musique ses tourments intérieurs, notamment via un triptyque sonore bouleversant : « Isolation Boredome Syndrome (IBS) », « Isolation Depression Syndrome (IDS) » et « Isolation Blues (Blame It On The Pathogen ». Les compositions d’Ondara vont ainsi droit au cœur et remuent sans détour, sans artifices.

 

Porté par une voix habitée qui nous fait tour à tour penser à Jeff Buckley, Van Morrison et Neil Young, le folk d’Ondara est aussi profondément social et humaniste, contant avec puissance et lucidité les multiples impacts de cette crise, à travers des histoires simples de personnes ordinaires dont l’existence a basculé (« Pulled out of the market », « Mr. Landlord »).

 

Ces chansons si intensément ancrées dans 2020 nous ont donné envie de remonter le temps, en 2019, un temps qui nous parait aujourd’hui, en cette fin 2020, si loin, presque irréel, l’année où Ondara a sorti son premier album, Tales of America, et qu’il a complété quelques mois plus tard par 5 morceaux supplémentaires (Tales of America, The second coming).

 

Une découverte à rebours dont on a encore du mal à se remettre et qu’on écoute compulsivement, en boucle, jours et nuits d’insomnie. Parmi ces pépites folks, on trouve une très belle reprise de « Heart of gold » de Neil Young et une magnifique réinterprétation de « I’m afraid of Americans » de David Bowie. On a encore de la buée dans les yeux après une centième écoute, mais on y voit plus clair, « par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens », l’essentiel en somme.

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