Les délices du Walaku

Si vous passez un jour à Paris dans la rue Rousselet, au gré d’une flânerie sur la rive gauche, marchez lentement ou vous risquez de manquer l’entrée du Walaku. Ce lieu est si zen et si discret avec sa façade crème qu’il semble réservé aux seuls initiés. Familier des pâtisseries japonaises – également appelées Wagashi – ou récents convertis aux dorayakis par le film de Naomi Kawase, An (Les délices de Tokyo), soyez sans crainte et comme nous, poussez la porte !

Nous pénétrons à pas feutrés dans le minuscule salon de thé, chuchotant presque, et nous nous asseyons en face du chef pâtissier, Monsieur Murata. Ici, l’on fait « cuisine ouverte », à la japonaise. Nous sommes deux et l’endroit semble déjà bondé, il doit y avoir huit places, au bas mot ; le cadre est intime, épuré. Takanori Murata répond à nos questions tout en préparant les fameux dorayakis qui ont tant aiguisé notre curiosité.

Très concentré, avec des gestes précis, il confectionne de petits pancakes tout en nous racontant son parcours : « Issu d’une famille de pâtissiers et formé à Kyoto, je suis arrivé en France en 2005 et j’ai très vite commencé à travailler pour le restaurant japonais Aida, à deux pas de là » nous confie t-il. Renseignements pris, Aida s’est vu attribué depuis une étoile au Michelin, mazette… « Le chef d’Aida a eu ensuite la bonne idée d’ouvrir cette annexe, authentique pâtisserie japonaise, où je peux rendre hommage à cette tradition plus que centenaire ». Une douce odeur sucrée commence à se dégager alors que la pâte commence à dorer…

Ce qu’il faut pour réaliser cette pâte ? « De la farine, des œufs et du sucre, sans oublier un sucre japonais spécial et du sirop de glucose. Laisser reposer 20 minutes environ… », nous explique Monsieur Murata. Pour le reste, nous n’osons pas demander… Les Japonais font-ils des dorayakis maison ? « Pas vraiment, car il faut beaucoup de patience et de savoir-faire pour préparer le « an », la pâte de haricots rouges », précise le chef-pâtissier. Pas étonnant donc que les Japonais les achètent dans une pâtisserie ou une échoppe de rue, comme dans Les délices de Tokyo. Un peu moins traditionnel, Takanori Murata suggère également « de garnir les dorayakis de chocolat ou de préparations à base de thé matcha, de patate douce, de châtaigne : pour accompagner le rythme des saisons ». Miam !

Voici le fameux « an » : c’est une préparation compacte, au parfum très discret. Monsieur Murata en dispose quelques cuillerées sur un pancake et referme le petit gâteau avec une autre petite crêpe. Disposés sur une assiette argentée, ils sont du plus bel effet ! Emilie me fait signe, regarde l’assiette avec une gourmandise non dissimulée ; on nous sert à chacune une petite tasse de thé grillé. Toute timidité bue, nous goûtons. Le moelleux des pancakes répond à la saveur sucrée du « an », évoquant à nos palais occidentaux le goût des châtaignes (la comparaison est sans doute un peu osée), un parfum de jardin en automne, le tout sublimé par les arômes subtiles de ce thé exceptionnel. L’accord est parfait.

Voilà qui nous ouvre l’appétit… Nous demandons à être présentées à d’autres Wagashi. Ronds, petits et précieux, ils ressemblent à de délicates œuvres d’art, toutes en nuances et en simplicité : on est loin d’un triomphal Opéra ou d’un tonitruant Saint-Honoré ! Voici le Joyo, une délicatesse ancestrale qui tire son nom de l’igname. On dirait de la pâte d’amande décorée d’une branche de cerisier stylisée. Mais que nenni, il s’agit bien d’une pâte à base de farine d’igname fourrée à la pâte de haricots rouges.

Mr Murata – Salon de thé Walaku

Puis, les daïfukus, que l’on garnit parfois de prunes, et qui s’embellissent eux-aussi en ce mois de février d’asukis, le nom japonais de ces haricots rouges couleur de soleil que l’on retrouve partout. On imagine déjà le moelleux de son gâteau de riz gluant, aussi appelé « mochi » et l’attrait de son cœur curieusement sucré. Voici enfin le kinton, ou « petit morceau », cette fois à base de haricots blancs… Haricots rouges, haricots blancs : on dirait une comptine pour enfant que l’on pourrait manger, ou que réciterait La Princesse Kaguya, elle qui vient de la lune. Malheureusement, nous ne venons pas de si loin et il est déjà temps pour nous de quitter le Walaku et le chef Murata : si on allait manger japonais ?

 

Walaku par Aida
33, rue Rousselet
75007 Paris
Tel : 01 56 24 11 02

2 avis pour “Les délices du Walaku

  • 20/02/2016

    Bonjour Amédée, M.Murata n’a pas besoin de moules ! Il verse directement la pâte sur la plaque chauffante et la perfection de ses pancakes n’est due qu’à sa maîtrise et à son savoir-faire. Impressionnant et savoureux…

  • 19/02/2016

    Suite au visionnage de la vidéo une question me taraude : Mr Murata se sert-il d’un moule à pancakes ou d’une simple plaque de cuisson ? Merci

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